En droit français, l’usufruitier jouit du bien comme le propriétaire lui-même à charge d’en conserver la substance.
Il en résulte quelques règles simples en matière de bail. En principe, la conclusion du bail relève du pouvoir du seul usufruitier, sauf pour les baux ruraux et les baux commerciaux en raison des prérogatives que la loi confère dans ces situations au preneur.
L’accord du nu-propriétaire est alors nécessaire. L’usufruitier, qui a la jouissance du bien, ne peut, en application de l’article 595, dernier alinéa, du code civil, consentir un bail commercial ou le renouveler sans le concours du nu-propriétaire (3e Civ., 24 mars 1999, pourvoi n° 97-16.856, Bull. 1999, III, n° 78) ou, à défaut d’accord de ce dernier, qu’avec une autorisation judiciaire, en raison du droit au renouvèlement du bail dont bénéficie le preneur.

Faut-il alors par parallélisme des situations considérer que le non-renouvèlement du bail exige également l’accord du nu-propriétaire ?
Non répond fermement la Cour de cassation : « l’usufruitier a le pouvoir de mettre fin au bail commercial et, par suite, de notifier au preneur, sans le concours du nu-propriétaire, un congé avec refus de renouvèlement (3e Civ., 29 janvier 1974, pourvoi n° 72-13.968, Bull. 1974, III, n° 48) ;
Qu’ayant, seul, la qualité de bailleur dont il assume toutes les obligations à l’égard du preneur, l’indemnité d’éviction due en application de l’article L. 145-14 du Code de commerce,
qui a pour objet de compenser le préjudice causé au preneur par le défaut de renouvèlement du bail, est à sa charge ;

Qu’en condamnant la nue-propriétaire, in solidum avec l’usufruitière, alors que l’indemnité d’éviction n’était due que par celle-ci, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; ». (Cass. 3ème civ. 19 dec. 2019, n° 18-26.162).
La solution parait logique : le défaut de renouvèlement du bail par essence ne grève pas la substance de la chose. Une telle prérogative ne peut relever par essence des prérogatives légales de l’usufruitier.
Il en résulte donc que l’usufruitier est seul débiteur de l’indemnité d’éviction

Par Michel Leroy – Avril 2020

Mots clefs

Droit des biens – Droit du bail 

Thématique

Usufruit- Substance – Bail commercial – Renouvèlement

Étiqueté avec :

JurisCampus – Institut de formation professionnelle