Assurance vie -renonciation expresse au droit de rachat – contrat rachetable (NON)

Cass com, 12 décembre 2018 n°17-20.913

Pour la première fois, la Cour de cassation précise qu’une clause de renonciation au rachat acceptée par les bénéficiaires rend le contrat non rachetable au sens de l’ISF. Cette solution, transposable à l’IFI, est de nature à produire d’autres effets pratiquement très importants.
Ce second arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation nous paraît beaucoup plus intéressant et important que le précédent.
Il traite en effet des conséquences de la renonciation par le souscripteur au droit de créance portant sur la droit de rachat ;
La Cour de cassation en précise les effets pour l’ISF, mas d’autres conséquences peuvent en être dégagées.
En l’espèce, une personne rédige le 15 décembre 2007, un avenant à un contrat d’assurance sur la vie souscrit en 1991. L’avenant contenait la clause suivante : «?En vertu de l’acceptation de la présente désignation par les bénéficiaires de premier rang, le souscripteur s’interdit formellement et irrévocablement de modifier leur désignation en tant que bénéficiaires. En outre, à compter de l’acceptation, le souscripteur s’interdit expressément et irrévocablement de demander à l’assureur de procéder à son profit à des rachats (souligné par nous) ou à des avances sur le présent contrat » (CA Paris, pôle 5 – ch. 10, 20 mars 2017, n° 15/09780).
Pour le souscripteur cette clause avait pour effet de rendre le contrat non rachetable au sens de l’ISF, ce qu’elle indiqua dans sa déclaration pour les années 2008, 2009 et 2010. Faisant en 2011 l’objet d’un redressement, le redevable assigna l’administration en justice pour la condamner à rembourser les sommes versées en raison de ce redressement.
L’effet de la clause insérée dans l’avenant sur le caractère rachetable du contrat était au cœur de ce contentieux.
Pour la Cour de cassation, « ayant constaté que, dans l’acte du 15 décembre 2007, les bénéficiaires avaient accepté leur désignation et Mme D… avait renoncé expressément et irrévocablement à l’exercice de sa faculté de rachat des sommes versées au titre du contrat d’assurance sur la vie litigieux, il en déduit que ce contrat a acquis un caractère non rachetable ». Surtout « en l’état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que le droit de créance du souscripteur était sorti de son patrimoine, le retour à la situation antérieure à l’acte du 15 décembre 2007 étant subordonné à l’accomplissement d’une condition tenant à l’accord de l’ensemble des bénéficiaires, c’est à juste titre que la cour d’appel a retenu que la décision de rejet de l’administration fiscale n’était pas fondée et a prononcé le dégrèvement et la restitution des suppléments d’impôts versés par M. et Mme D… ».
L’arrêt nous semble de première importance car il vient préciser les effets de la renonciation au rachat dont la Cour de cassation avait posé le principe dans un célèbre arrêt de chambre mixte.
Selon la Cour de cassation, « lorsque le droit de rachat est prévu dans un contrat d’assurance vie mixte, le bénéficiaire qui a accepté sa désignation n’est pas fondé à s’opposer à la demande de rachat du contrat en l’absence de renonciation expresse du souscripteur a son droit » (Cass. ch. mixte, 22 févr. 2008, n° 06-11934 : JCP G 2008, II, 10058, note L. Mayaux ; Cass. 2e civ., 19 févr. 2009, n° 08-11917 : RGDA 2009, p. 542, note L. Mayaux?; Cass. 1re civ., 4 nov. 2010, n° 09-70606 : LEDA, déc. 2010, p. 5, Cass 2ème civ. 08 juin 2017, n° 12-17.137).
L’arrêt de 2018 précise certaines des effets de cette renonciation. Ainsi, implicitement mais nécessairement, il nous semble que la Cour de cassation consacre un principe affirmé autrefois par la réponse ministérielle Dolez du 16 février 2010 (JO Assemblée nationale, 16 février 2010, p. 1691, n°18 648), selon laquelle le contrat d’assurance vie accepté demeure déclarable à l’ISF sur la base de sa valeur au 1er janvier de l’année d’imposition.
En effet, le caractère non rachetable n’est pas, pour la Cour de cassation déterminée par l’acceptation de la désignation bénéficiaire mais par la renonciation du contrat.
La solution est-elle transposable aux acceptations postérieures au 18 décembre 2007 ? La réponse nous semble affirmative. Car c’est en raison de la sortie du droit de créance que le contrat n’est pas, selon la Cour de cassation, rachetable.
Les conséquences de l’arrêt ne peuvent pas se limiter à l’IFI ou à l’ISF. L’insertion d’une telle clause impacterait le traitement des contrats non dénoués communs en biens.
Il nous semble :

  • Que l’insertion d’une telle clause en cours de mariage n’est possible qu’en respectant l’article 1422 du Code civil
  • Que le contrat ne serait plus constitutif d’un acquêt de sorte que ni Praslicka ni la réponse ministérielle CIOT, serait lors de la liquidation applicable
  • Une récompense serait due pour le montant des primes versées.

Par Michel Leroy – Janvier 2019

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Assurance vie – renonciation expresse au droit de rachat – contrat rachetable (NON)

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Fiscalité

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